samedi, janvier 27, 2024
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CAFI ET LE GABON

Le changement climatique et la perte de biodiversité sont les défis majeurs de notre génération. Aucun autre phénomène n’a le potentiel de changer à jamais le visage de notre planète. Les forêts tropicales sont au cœur de ces deux phénomènes : elles stockent et absorbent le carbone et abritent plus de 50 % de la biodiversité terrestre alors qu’elles ne couvrent que 6 % de la surface de la Terre. Aucun autre écosystème ou secteur économique n’a la même capacité à inverser la crise du climat et de la biodiversité en cours. En d’autres termes, en prenant mieux soin des forêts, nous pouvons apporter une contribution majeure à la lutte contre le changement climatique et à la sauvegarde de la biodiversité. Il est important de noter que les forêts sont également essentielles à la survie des personnes qui vivent à l’intérieur et autour d’elles.

L’Afrique centrale abrite la deuxième plus grande forêt tropicale du monde. C’est l’une des rares régions du monde qui absorbent plus de carbone qu’elles n’en émettent. L’Afrique centrale abrite également plus de 10 000 espèces végétales et animales. Elle est la source de nourriture, d’énergie, d’abris et de spiritualité pour plus de 40 millions de personnes vivant à l’intérieur et autour d’elle.

Gabon

Le Gabon est exceptionnel. 88% de son territoire est couvert de forêts, ce qui en fait le deuxième plus grand couvert forestier du monde (23,6 millions d’hectares).

Le Gabon est non seulement le deuxième pays le plus boisé de la planète, mais il possède également une forêt unique et riche. Ses forêts denses et anciennes, qui représentent plus de 75 % de la forêt gabonaise, contiennent 330 tonnes de carbone par hectare, soit près du double de la moyenne des forêts tropicales humides. Le Gabon présente un profil d’émission impressionnant : au lieu d’émettre des gaz à effet de serre, le pays absorbe en fait chaque année environ 110 millions de TCO2e de notre atmosphère – en d’autres termes, c’est un puits net (voir figure 1 : profil d’émission du Gabon). Cette situation n’est pas le fruit du hasard. Outre une faible densité de population, une forte population urbaine et une économie basée sur le pétrole, le gouvernement gabonais a pris des mesures audacieuses pour préserver ce capital naturel, notamment en créant un système unique de zones protégées ou en interdisant l’exportation de grumes.

Le Gabon possède également l’un des écosystèmes les plus riches, abritant des espèces emblématiques telles que les gorilles ou l’éléphant de forêt (dont 60% de la population ne se trouve plus qu’au Gabon, une population qui a récemment été inscrite sur la liste rouge de l’UICN comme étant en danger critique d’extinction). Les éléphants rendent les forêts gabonaises uniques, car c’est seulement ici que l’on trouve encore la mégafaune dans les forêts tropicales humides, dans tous les autres bassins forestiers elle s’est éteinte. Les éléphants façonnent les forêts, car ils contribuent à la croissance d’arbres gigantesques, qui sont les principales installations de stockage de la forte teneur en carbone mentionnée dans le paragraphe ci-dessus.

L’Initiative pour la forêt d’Afrique centrale (CAFI) travaille avec le Gabon depuis sa création, le gouvernement gabonais participant activement à la conception de l’initiative avec d’autres partenaires. CAFI et le Gabon ont signé une première lettre d’intention en 2017 dans laquelle le pays s’est engagé à arrêter la conversion de ses forêts de haute valeur et à limiter la conversion à 10 000 ha par an dans les forêts dégradées. Le pays a également pris d’autres engagements tels que la réduction de la surface sous concession forestière ou l’amélioration de la gouvernance forestière.

CAFI a fourni un financement (30 millions de dollars US) au Gabon pour soutenir la réalisation des objectifs définis dans la lettre d’intention.

Après les premiers résultats prometteurs de la première phase du partenariat et afin de reconnaître les efforts du pays pour préserver sa forêt, CAFI, avec le leadership de la Norvège, a signé un accord de paiement basé sur les résultats avec le Gabon en 2019 lors du Sommet Action Climat. Cet accord historique mobilise des paiements pour des réductions d’émissions vérifiées à hauteur de 150 millions de dollars US pendant dix ans, pour la première fois pour un pays africain.

Le Gabon a rempli les conditions de l’accord de paiement basé sur les résultats et a présenté des réductions d’émissions vérifiées pour 2016-7 s’élevant à 5 203 391 tCO2. Les résultats ont été vérifiés de manière indépendante par AENOR Confia et ils n’incluent pas d’ajustements (c’est-à-dire une augmentation artificielle du niveau de référence afin qu’ils soient comparés aux émissions historiques réelles.). CAFI et le Gabon annonceront cette réalisation historique et effectueront le 1er paiement.

Soutenir le Gabon et reconnaître les efforts accomplis va au-delà de la compensation des réductions d’émissions. Grâce à leurs vastes écosystèmes forestiers intacts, les pays à forte densité forestière et à faible déforestation (HFLD) jouent un rôle important dans l’atténuation et l’adaptation au changement climatique mondial. La recherche scientifique indique que la séquestration du carbone dans les forêts intactes contribue à l’atténuation du changement climatique à hauteur de plus de 1 Gt CO2e par an, soit plus de 10 % de l’atténuation basée sur la nature pour éviter un réchauffement de 2 degrés.

Mais ce potentiel reste débloqué par les mécanismes internationaux de financement du climat. Selon les méthodologies REDD+ conventionnelles, les pays qui ont subi une déforestation à grande échelle peuvent en fait obtenir une récompense beaucoup plus élevée pour des réductions relativement faibles de leurs taux de déforestation, que les pays HFLD qui ont toujours préservé leur patrimoine forestier naturel et contribué par des absorptions importantes à la lutte contre le changement climatique, mais pour lesquels les méthodologies existantes ne récompensent pas leurs efforts. Cette situation est clairement injuste pour les pays HFLD et ne contribue pas à la réalisation des ambitions de l’Accord de Paris. En effet, l’activité REDD+ «Conservation des stocks existants» est l’une de celles qui n’a pas reçu beaucoup de financement et les absorptions fournies par les forêts existantes sont souvent présentées à tort comme ayant moins de valeur ou ne répondant pas au critère d’additionnalité en termes de ce que l’atmosphère «sent» par rapport aux réductions d’émissions.

En tant que résultats, la reconnaissance des efforts du Gabon (à la fois financièrement par CAFI et politiquement par l’UNSG) contribuera grandement à encourager la préservation de ces puits de carbone massifs mais fragiles

NE RIEN RATER
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